Pourquoi parler de “sexualité / corps / consentement” dès tout petit (3 ans et même avant) ?
D’abord, parce que nous ne pouvons plus faire abstraction des chiffres :
Dans leur enfance, 13 % des femmes et 5,5 % des hommes ont subi des violences sexuelles, et 4,6 % des femmes et 1,2 % des hommes, des violences incestueuses. (Sources : 1 – CIIVISE, 2022. 2 – Inserm, 2021. Site du gouvernement).
Et au vu des procès qui n’en finissent pas, d’auteurs qui ne se sont pas rendu compte qu’ils abusaient , il faut se rendre à l’évidence : le consentement n’est pas une notion acquise dans notre société.
Il est donc essentiel de parler du consentement avec nos enfants :
👉 “Ton corps t’appartient et c’est toi qui décides.”
👉 “Seuls tes parents ou un médecin (en présence d’un parent) peuvent toucher ton corps ou tes parties intimes si cela est vraiment nécessaire, pour t’aider à te laver par exemple. Mais c’est seulement avec ton accord !”
Sur ce sujet, nous avons eu la chance d’interviewer Tessy Vanderhaeghe, autrice du livre 100 petites conversations à avoir avec son enfant (Ed. Marabout).
Elle insiste sur l’importance d’apprendre aux enfants à ne jamais garder de secret imposé. “Il y a une différence entre une confidence intime que quelqu’un te fait et un secret qu’on te demande de cacher.”
💬 “Si quelqu’un te demande de garder un secret, tu réponds quoi ?”
💡 “Non, dans ma famille, on ne garde pas les secrets.”
Et il est important de dire à nos enfants aussi de ne pas croire quelqu’un qui menace de te faire du mal pour te forcer à garder un secret.
Mais à 2-3 ans, enseigner le consentement à notre enfant, c’est aussi, dès cet âge-là, lui apprendre à dire “non”.
Apprendre à tous nos enfants à dire “non” et aussi à accepter un “non”
Cela commence dès tout petit, par un câlin, et plus généralement par le fait d’être touché ou embrassé par quelqu’un. Cela vaut aussi pour nos ados !
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“C’est ton corps, et personne n’a le droit de le toucher si tu ne te sens pas à l’aise avec cela. On ne fait pas un câlin pour faire plaisir à l’autre.”
Trop de gens, encore aujourd’hui, ont des relations sexuelles “pour faire plaisir” à leur partenaire. Combien de personnes n’ont, un jour, pas osé dire “non” à quelqu’un qui voulait les embrasser, ou à leur mari / femme / partenaire qui voulait faire l’amour, de peur de le/la blesser ?
Tessy ajoute : “Il n’est plus acceptable de dire à un enfant “Oh, mais je suis trop triste si tu ne me fais pas de câlin…!” On ne peut pas faire porter à l’autre la responsabilité de nos émotions, et faire du chantage affectif (se vexer, dire qu’on n’est pas content…) pour obtenir un contact physique !”
Donc, à l’inverse… Il est essentiel que notre enfant comprenne que quand quelqu’un n’a pas envie de lui faire un câlin, cela n’a rien à voir avec les sentiments qu’il a pour lui, c’est juste qu’il n’en a pas envie. Et il est important de le respecter.
Il n’y a aucune raison de prendre ces refus “pour soi”. Cela ne veut rien dire sur votre relation, cela signifie juste qu’à ce moment-là, cette personne n’en a pas envie. Peut-être qu’elle n’est pas tactile, peut-être qu’elle n’est pas disponible mentalement, peut-être qu’elle est fatiguée. Aucune affection physique n’est due à qui que ce soit. Personne ne peut insister pour avoir un contact physique, car insister, ce n’est pas laisser l’espace nécessaire à l’autre pour décider par lui-même s’il en a envie ou pas.
Voyez-vous comme ceci est aussi essentiel à enseigner à nos enfants comme à nos ados ?
Les films sont aussi l’occasion d’avoir ce genre de conversation.
“Tu as vu qu’il ne lui a même pas demandé si elle voulait être embrassée ? Comment peut-il savoir qu’elle en a envie ? Si ça se trouve, elle n’en avait pas envie et s’est retrouvé coincée…”
- Alors, comment savoir si l’autre en a envie ? Voici des exemples de phrases :
- Par exemple pendant que l’autre parle, on peut lui dire : “J’ai très envie de t’embrasser…” laisser un blanc, et ensuite lui demander ensuite : “Et toi ?”
- ” Je compte dix secondes dans ma tête, si tu me fais un clin d’oeil pour me dire que tu es ok, je t’embrasse.”
- “Est-ce que tu veux que je t’embrasse ?”
- “Ça te dirait qu’on aille à l’écart pour s’embrasser ?”
Bon tout est dans le ton (et le désir)… mais si, mais si, cela peut être très romantique ! Et là, la question vient… “Mais si il/elle dit non ?”
Se rend-on compte de l’ineptie : parfois on préfère ne pas demander de peur que la personne dise non… On redoute plus d’entendre un “non” que d’embrasser quelqu’un qui n’en a pas envie ! Comme si un “non” était un rejet absolu.
D’où l’importance d’insister auprès de notre enfant sur le fait que si une amie, par exemple, n’a pas envie de l’embrasser, ce n’est pas qu’elle ne l’aime pas, c’est juste qu’elle n’a pas envie d’avoir de contact physique. Il peut y avoir mille raisons à cela, et cela ne remet pas en cause sa valeur.
Il faut au contraire apprendre à nos enfants qu’il est essentiel de laisser à l’autre, l’espace nécessaire pour qu’il puisse se sentir pleinement à l’aise de dire non (que ce soit pour un câlin, un baiser, une caresse intime, etc.).
Et si il/elle dit rien => c’est que c’est non. Il / elle n’a peut-être pas envie de te blesser.
“Se sentir à l’aise” : la boussole de nos relations
Je rappelle un autre chiffre : pour 1 femme sur 6, l’entrée dans la sexualité se fait par un rapport non consenti et non désiré. Pour 36 % de ces répondantes, ce rapport a eu lieu avant leurs 15 ans.
(Source : enquête réalisée sur 100 000 personnes)
🔗 Dossier complet “J’ai Pas Dit Oui”
Il n’est absolument pas normal que dans tant de relations sexuelles, l’une des deux personnes ne se sente pas à l’aise.
Dans son livre, Tessy propose aussi d’apprendre à nos enfants, dès tout petits, à identifier quand ils ne se sentent pas à l’aise :
- Tu as envie de pleurer.
- Tu transpires tout à coup.
- Tu as le cœur qui bat très fort.
- Tu n’arrives plus à parler.
- Tu es tétanisé(e).
- Etc.
Pour qu’ils puissent savoir que, dans ces moments-là, quelle que soit la situation, même s’il n’y a aucun danger apparent, ils doivent faire confiance aux sensations de leur corps. C’est lui qui a raison. Et ils ont le droit de partir, de dire non, d’aller voir quelqu’un pour demander de l’aide, etc. Et ne pas avoir honte de cela.
Quelques ressources pour vous aider
Bon, après, le plus gros challenge, clairement, c’est nous-mêmes : être à l’aise avec ces sujets. Nous, à qui on n’en a jamais parlé. Nous, pour qui c’est tabou…
Pour vous y aider, il y a des comptes Instagram comme celui de Tessy yestess.familles ou d’orgasme_et_moi, qui vous permettent d’écouter des personnes en parler avec naturel. Cela aide à en parler plus naturellement à notre tour.
Et il y a des livres aussi :
📖 100 petites conversations à avoir avec son enfant – Tessy Vanderhaeghe (à destination des parents)
📖 Corps, amour, sexualité : les 120 questions que vos enfants vont vous poser – Charline Vermont (à destination des enfants)
Vous pouvez laisser ce dernier dans leur chambre. L’avantage des livres, c’est que les enfants ne lisent que ce qui les intéresse et ne vont pas feuilleter les pages qui ne sont pas adaptées à leur âge. Cela ne remplace pas une conversation, mais cela peut servir de support.
Et pour les petits enfants, il y a des manuels illustrés :
📖 Dès 3 ans : Ton corps t’appartient ! – Premières notions d’intimité et de consentement
📖 Dès 3 ans (super livre qui vient de sortir !) : Mon corps Mon intimité : Tu veux qu’on en parle ?
📖 Une collection en 3 tomes selon l’âge : Et si on se parlait ? Le petit livre pour aider les enfants à parler de tout, sans tabou.
Deux petits conseils pour finir :
1️⃣ N’hésitez pas à dire à vos enfants que vous n’êtes pas à l’aise :
“Je ne suis pas très à l’aise avec ce sujet, car c’est vrai qu’on ne m’en avait jamais parlé, mais je ne voudrais pas faire la même erreur avec toi.”
2️⃣ Posez des questions ouvertes :
“Est-ce que tu as déjà entendu parler de “xxxx” ? Tu sais ce que c’est ? Est-ce que tu te poses des questions à ce sujet ?”
Et surtout, plein d’indulgence envers vous-même ! On ne se débarrasse pas d’un tabou en un jour, chaque petit pas compte. 🙂
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